Paf! Avec clarté et forcé, la giffle a retenti dans la sacristie. Le père Georges n’a même pas réfléchi : ses réflexes de karatéka ont répondu à sa place, l’oitsuki est parti seul. La femme qui serait exorcisée cet après-midi-là à la Chapelle de Notre Dame du Perpétuel Secours avait la lèvre fendue.
-Entrez Madame, asseyez-vous, a dit l’exorciste, et il est sorti. Il a dit à Georges : je vais appeler le recteur de la basilique, je pense qu’on ne sera pas trop à trois.
Quand le prêtre est sorti, la dame s’est rapproché du père Georges, et lui a dit, presque collé contre lui:
-Qu’est-ce que tu fais là ?
-Et toi, pourquoi tu es venue ? lui a répliqué le prêtre.
-Moi je ne suis pas venu, c’est cette idiote qui m’a amené ici.
Le prêtre a vite compris que ce n’était pas la femme qui parlait, mais le diable qu’elle avait aucorps. Quand l’exorciste principal et le recteur sont rentrés, ils ont trouvé une scène dantesque : la femme saignait, le père Georges voulait lui éponger le sang avec des kleeenex. Marie essayait de le mordre et grognait. Ils sont parvenus à la calmer et ils ont commencé l’exorcisme. Trois prêtres, aubes blanches, étoles rituelles, eau bénite. Trois prêtres et une femme menue: dans quelques minutes ils ne seraient plus capables de l’immobiliser.
-Seigneur, ayez pitié de nous.
-Jésus-Christ, ayez pitié de nous.
-Jésus-Christ, écoute-nous.
-Sainte Marie Vierge, priez pour nous.
-Sainte Marie, Mère de Dieu, priez pour nous.
-Saint Michel, priez pour nous.
-Saint Raphael, priez pour nous.
-Saint Gabriel, priez pour nous.
Le temps s’écoulait lent, accroché aux mots. Combien de saints tiennent dans les litanies catholiques ? Ils semblaient infinis. Je fais des recherches sur les exorcismes depuis trois ans, après en avoir passé 15 à étudier le catholicisme en Argentine. Ma recherche a commencé dans mon pays, je n’ai pas pu m’empêcher d’allerà Paris, en Normandie et en Picardie pour m’interroger sur l’augmentation des pratiques d’exorcisme en France. Encore aujourd’hui, j’ajoute des noms de saints sur ma liste.
Les noms sacrés, les croix et les étoles avaient fini par rendre Marie furieuse : elle se débattait, donnait des coups de pieds, toussait, avait des haut-le-cœur. Cet exorcisme a été mené avec peu de paroles : le père Georges m’en raconterait d’autres, quelques-uns conversés, d’autres moins frappants.
Les trois prêtres intervenaient à tour de rôle pour les prières et les invocations : Seigneur, aidez-nous, Sainte Marie, Vierge de Lourdes, priez pour nous, Saint Benoît, priez pour nous. Le moment de l’intercession occupe une bonne part du rituel de l’exorcisme : tous les saints son invoqués pour combattre l’Adversaire.
L’exorciste en chef l’avait prévu : ce jour-là le rite a été animé. Dans le tempsles patientsétaientretenus, maintenant on les laissealler et faire ce qu’ilsveulent. Pour cet exorcisme, un prêtre priait, les autres l’accompagnaient et tentaient de faire se tenir assise cette femme sur une chaise : c’était difficile, Marie courbait le dos, ses mains tendues comme des serreslafaisaient se lever et porter des coupsavec une force surprenante. Les cris de la possédée augmentaient en intensité : la croix sur son front semblait la brûler.
-Je te conjure, Satan, ennemi du salut des hommes. Reconnais la justice et la bonté de Dieu le Père, qui, par Son juste jugement a condamné ton orgueil et ton envie. Quitte cette servante de Dieu, Marie.
Au terme d’une vingtaine de minutes de lutte, la cérémonie a commencé à la calmer : comme beaucoup de patients, elle finissait épuisée. Marie a été libérée en une seule séance : ce qu’il y avait en elle n’est pas revenu. L’exorcisme terminé, elle n’avait plus rien sur les lèvres: pas la moindre trace du coup du curé karatéka. Pas une goute de sang.
Le père Georges est grand et il a une allure athlétique. Il porte un blazer noir et les cheveux très courts et grisonnants : dans ses yeux clairs passe parfois une lueur d’ironie. Il m’a reçue dans un petit salon plein de livres. Il a une collection de lampes en cuivre : il trouve, comme les gens du Nord, qu’elles apportent de la lumière. Faisant montre d’une hospitalité impeccable, entre cafés et chocolats belges, il m’a raconté son métier : il dirige le Service Saint Michel, qui s’occupe des personnes harcelées par le Démon, et il est le premier exorciste de ceux du diocèse de Paris. Un exorciste qui croit que le Démon agit, et qu’il a les outils de l’Église pour le combattre.
-Je suis exorciste par pure obéissance, commence-t-il. Je n’avais jamais imaginé l’être jusqu’au jour où l’évêque me l’a proposé. J’ai travaillé longtemps avec les Scouts, et je continue à diriger une troupe, ça équilibre un peu…
L’exorcisme de Marie est l’un des nombreux rituels qu’il a vécus : la gifflea été une des rares fois où il s’est fait agresser par une possédée.
Notre entrevue a inclus la visite de la chapelle où l’on célèbre les exorcismes : une crypte illuminée, au plafond bas et avec une double porte. L’intérieur en est austère : quelques chaises en bois, l’autel en pierre et un tapis épais qui couvre presque tout le plancher de la salle. Sur les murs, des reproductions d’un ange de Fra Angelico, de l’archange Saint Michel et d’une Vierge style renaissance. Des 2500 personnes qui consultent le Service Saint Michel, peu arrivent jusqu’ici : le père Georges soutient que seulement 40 sont vraiment possédées, ou sont attaquées par Satan : 1,6%. La plupart raconte des maux peu spécifiques : cela va des maladies chroniques aux oppressions de poitrine cauchemardesques, des présences fantasmagoriques dans les maisons. Pourtantle père George n’a pas le moindre doute : le Diable est de retour en France.
-Il y a de ça 50 ans, il n’y avait pas un seul village en France ou il n’y ait pas une église ouverte, avec le Saint Sacrément, et avec des gens en prière. Aujourd’hui, beaucoup d’églises sont fermées, et il n’y a plus d’adoration du saint sacrément. Je pense que le Diable se sent beaucoup plus chez lui maintenant qu’il y a 50 ans, c’est aussi simple que cela.
Sorcelleries
Mon intérêt pour l’étude des exorcismes avait commencé il y a une paire d’années, dans une autre ville, sur un autre continent. J’ai suivi deux prêtres de la périphérie de Buenos Aires qui expulsent des démons toutes les semaines : j’ai parlé avec eux et avec ceux qui les assistent, j’ai fréquenté des messes, assisté à des rencontres, des impositions des mains, des bénédictions. L’augmentation des exorcismes en France ne pouvait pas me laisser indifférente, mais j’ignorais combien elle allait me fasciner. Dès que j’ai pu, j’ai passé un concours de Directeur d’Études Associée à la Maison des Sciences de l’Homme pour entreprendre une recherche comparative. Le travail de terrain à Buenos Aires avait été laborieux et difficile : des espaces interdits, des personnes peu disposées à parler dans les entretiens, des documents ecclésiastiques introuvables ou inexistants.
En France, la chose avait commencé plutôt bien : un ancien camarade de doctorat, prêtre diocésain, s’est intéressé à mon travail. Il m’a présenté le père Georges, son camarade d’études. Mais après notre première entrevue, révélatrice, les portes s’étaient refermées. Le père Georges avait conclu notre conversation très cordialement, avec un NON définitif : il ne me mettait pas en contact avec l’exorciste qui travaille avec lui, ni avec les écoutantes qui répondent au le téléphone et reçoivent les demandes de consultation. Le rapport au Prince du Mensonge demeure pour l’Église catholique une question délicate, qui doit être traité avec discrétion.
Mais j’en avais vu d’autres, et je n’allais pas m’avouer vaincue. En plus, le père Georges m’avait donné une information intéressante : 65% de ceux qui demandent une consultation ont une origine africaine ou antillaise, sont des migrants des anciennes colonies françaises.
-Il faudrait une formation plus pointue sur les cultures africaines.
-Parlez-vous de la sorcellerie ?
-Oui. La foi chrétienne, même chez beaucoup de prêtres, ne remplace pas les croyances traditionnelles. Je n’ai jamais rencontré d’Africains, de Noirs qui aient vis à vis de leur propre culture suffisamment de recul pour la juger. Au contraire, moi j’ai toujours eu l’impression qu’il y avait une barrière infranchissable entre tout ce que l’occident a pu apporter à ces civilisations africaines et la culture de base africaine. Ils ont beau être diplômés des grandes universités,cela n’a rien à voir. Il y a une barrière infranchissable.
Le père Georges formule une idée peu originale : des millions de Français considèrent les Africains et les Antillais comme un Autre lointain et dangereux. Les migrants sont un problème de l’agenda public ; le racisme est une présence permanente qui se respire dans les rues, les écoles, les églises.
***
J’étais toujours en quête d’exorcistes, mais j’ai commencé à m’interroger sur ceux et celles qui sontensorcelés. Pourquoi en appelaient-ils à des exorcistes ? Comment arrivaient-ils jusqu’à eux ? Fréquentaient-ils des groupes de prière, ou y parvenaient-ils par les curés de leur paroisse ? Quel était le résultat de ces rencontres ?
Si chercher des exorcistes était un travail de fourmi, trouver leurs patients était pire. Le rapport entre les exorcistes et leurs patients est protégé par un pacte de confidentialité similaire à celui des médecins o des avocats, même s’il n’est pas réglementé. Les exorcistes racontent leurs cas, mais ils sont réticents à donner leurs contacts.
J’ai eu la chance de l’obstiné: Anne m’a trouvée, elle. Sortir de Paris a ses avantages : le père Jean-Serge, prêtre d’une paroisse périphérique de la Haute Normandie, m’a montré que les relations dans les provinces sont plus ouvertes et moins méfiantes que dans le centre du monde. Jean-Serge a été mon Virgile dans ce monde étrange : il a cherché des numéros de téléphone, m’a mise en contact avec des exorcistes et des évêques. Il m’a emmenée les voir dans sa voiture, fait des kilomètres et des kilomètres sur les routes vertes de la campagne normande.
À notre deuxième rencontre, il m’a donné une feuille.
Anne est l’une de mes paroissiennes, m’a-t-il dit. Je lui ai parlé de ce que tu faisais, elle veut faire ta connaissance.
La feuille était un format A4 pliée, écrite avec une encre bleuedans une calligraphie que j’ai appris à identifier chez les français. Le téléphone d’Anne y était indiqué, ainsi qu’une liste curieuse : les noms de deux curés qui faisaient des exorcismes, le père Brune et le père Pascal, et une date à retenir, le samedi 16 janvier. Une Journée du Renouveau Charismatique aurait lieu : je ne pouvais pas la manquer. J’ai téléphoné à Anne, nous avons échangé, elle a insisté pour que j’aille à cette Journée. C’est important, m’avait-elle dit. Il s’y passe des choses fortes.
Trois jours plus tard, un samedi très tôt, j’ai pris le métro pour aller à cette Journée. Je suis descendue à la station Saint-Ouen, à la limite de Paris, côté banlieue. Dès que je suis entrée dans lesalon, énorme et bondé, Anne a tourné la tête et elle est venue vers moi. Je l’ai reconnue tout de suite –je suis grande, j’ai une jupe longue, m’avait-elle indiqué. Dans le cadre de la France rationnelle, laïque et cartésienne, Anne est singulière : la foi est une présence constante dans sa vie, elle fréquente des rencontres œcuméniques, et elle reçoit des prophéties.
Anne aime beaucoup parler, elle parle même avec Dieu. Nous avons continué à causer bien après le déjeuner: la salle à manger s’était vidée lentement de ses commensaux. Dans le salon principal reprenait la séance de l’après-midi. Dans la salle à manger, en plus de nous deux, étaient restées trois personnes qui priaient : deux hommes appuyaient les mains sur le dos et la tête de l’autre.Leur prière était une espèce de chant doux et sibilant. Le patient, courbé sur ses jambes, avait des haut-le-cœur, toussait, éructait. Anne a continué à parler, tranquille. Moi, ces bruits me gênaient, me perturbaient.
-Ils sont en train de le guérir, m’a dit Anne quand elle a perçu mon intérêt. La prière est très puissante.
Les curés africains
J’ai connu Jean-Serge un matin de janvier, à la gare de traind’uneville de la Haute Normandie,à 96 kilomètres de Paris. Je n’étais pas parvenu à entrer en contact avec d’autres exorcistes, jusqu’au moment ou Danièle, chercheuse à la longue expérience sur le catholicisme, m’avait parlé de lui. En bon chef de famille, elle invitait le curé du de son village à dîner à chaque réveillon de Noël: les prêtressont souvent seuls. Et plus encore Jean-Serge, né à Brazzaville il y a 45 ans : il devait se sentir bien seul dans l’hiver froid de la Normandie rurale.
Jean-Serge parle un français clair, aux antipodes de l’accent parisien, aigu et affecté. Il a une voix profonde et musicale, de conteur d’histoires. Il est prêtre, mais il ne porte pas la soutane : pantalon en velours marron, veste bleu, écharpe assortie. Il est arrivé en France il y a 15 ans. Lui allait me permettre de comprendre ce qui font les curés de paroisse lorsqu’une de ses ouailles dit être harcelée par Satan.
Jean-Serge a été consulté à plusieurs reprises pour des démons et de la sorcellerie. Dans les zones rurales, les croyances populaires sont très enracinées, m’a-t-il expliqué,et ce malgré la modernisation dans l’Église depuis le Concile Vatican II. Processions, pérégrinations, adorations quasi fétichistes de statues des saints, eau bénite, la foi populaire déborde les églises des villages.
-La religion populaire se manifeste plus spécialement dans la recherche de qu’on appelait jadis les sacramentaux : les métaux, surtout. J’ai été très surpris de trouver cela ici. En Afrique passe encore, dit-il, ironique et peu complaisant.
Jean-Serge s’est efforcé de m’aider : il connaissait quelqu’un, Sophie, une femme de 35 ans qui se dit ensorcelée depuis sa naissance. Elle venait d’une famille avec beaucoup de problèmes, d’héritage, de terres. Elle était tout le temps malade, toujours fatiguée, elle souffrait de tachycarde. Elle avait énormément maigri les derniers mois, elle ressentait des vibrations au niveau de l’abdomen. Trop d’animaux de sa ferme tombaient malades. À son âge, elle était toujours célibataire, sans enfant: tous les symptômes de l’action destructrice des sorciers étaient là.
-Qu’est-ce que vous avez fait ?
-Ce que peut faire un curé de paroisse est prier. J’ai beaucoup prié avec elle. Mais elle n’était pas satisfaite, parce qu’elle n’en voyait pas trop les résultats. Elle me disait que celui qui l’ensorcelait était autrement plus puissant que moi.
-Lui avez-vous conseillé d’aller voir un exorciste ?
-Je le lui ai suggéré, mais elle disait qu’elle risquait de se faire envoyer dans un hôpital psychiatrique. Elle s’adressait à moi parce qu’elle disait qu’en tant qu’Africain, je pouvais la comprendre. Étant donné que la sorcellerie est un phénomène de ma terre, elle disait qu’il n’y avait que moi qui pouvait la comprendre.
-Sophie a des racines africaines ?
-Non, pas du tout. Elle est une « gauloise », 100%, Jean-Serge rit. Une gauloise 100%.
Les « Gaulois » sont, pour les prêtres africains, les franco-français, les Français « de souche ». Je me suis souvenue d’Astérix et d’Obélix, et moi aussi j’ai ri.
Jean-Serge a appelé Sophie, a eu une longue conversation. Il a essayé de trouver le moment de lui dire qu’on allait la voir, en vain. Je n’écoutais pas ce que Sophie lui disait, seulement les réponses espacées du prêtre. Il lui parlait du kinésithérapeute, du médecin. Sophie répondait, je supposeque selon les maillons d’une longue chaine de malheurs réels ou imaginaires. La voix musicale de Jean-Serge en répétait quelques-uns.
-Tu n’as pas dormi de la nuit… Tu ne dors pas depuis plusieurs nuits…Tu ne vas plus nulle part… Quels signes te montrent que l’ensorcellement vient de ta famille paternelle ?
La conversation a continué. Jean-Serge écoutait et acquiesçait, compréhensif et patient. J’ai imaginé Sophie seule dans sa grande maison de campagne. En janvier les jours sont courts, les nuits longues et froides. Les ombres grandissent dans le silence, et Sophie ne pouvait pas parler avec beaucoup de personnes. La voix chaude du prêtre africain de l’autre côté du téléphone était un fil qui la retenait contre la solitude et la folie. Lui le savait, et faisant exactement ce qu’on attendait de lui : écouter.
***
En France tout me semble ancien. Le mal aussi : il est enraciné dans le passé, dans les générations antérieures, dans l’histoire, dans l’enfance. Anne me raconte : son intérêt pour le mal est né parce qu’elle avait besoin d’expliquer une tragédie familiale qui avait eu lieu à Petra : sa grand-mère était allée visiter la ville jordanienne durant une pérégrination en Terre-Sainte, et le bus où elle voyageait a eu un accident, tuant tous les touristes français. Ce malheur a affecté toute la famille.
Dans sa quête, Anne a fréquenté un groupe charismatique de sa ville, mais il y avait des tensions et elle a fini par le quitter.
-Il y a des personnes qui ont des pratiques méchantes, m’a-t-elle raconté. La femme qui dirigeait le groupe de prière a fait quelque chose à ma sœur. Dans la Bible de cette femme, qui avait appartenu à son père, on y a trouvé des aiguilles. Et en plus, elle pratiquaitl’hypnose ériksonienne. Finalement, elle est décédée d’une mort horrible, au terme d’une sale maladie. Qu’elle s’explique auprès du bon Dieu désormais.
L’occultisme est une des causes de l’influence démoniaque, disent les prêtres exorcistes. Et Anne le croit fermement. La sorcellerie est encore vivante dans les zones rurales et les petits villages de France. Influences malines, mauvais œil, poupées manufacturées dans lesquelles on enfonce des aiguilles : les malintentionnés peuvent recourirà la magie noire pour se libérer de leurs ennemis.
La sœur d’Anne allait si mal, qu’elle la traînait de messe en messe. Une fois, elles ont participé d’une célébration, et un nuage de confusion a immobilisé Anne sur une chaise. Elle voulait bouger mais ne le pouvait pas. Au prix d’un effort surhumain, elle s’est obligéeà prendre l’eucharistie desmains du prêtre. L’hostie l’a sauvée. Elle lui a restitué ses énergies, et elle a fui ce lieu où quelqu’un avait étendu jusqu’à elle une influence néfaste.
La Fleur Divine
Au début d’une recherche, il m’arrive toujours la même chose : je pose deux lignes mais elles finissent par s’ouvrir dans toutes les directions. Je voulais suivre la piste des Antillais et des Africains, j’ai cherché des groupes de prière, et j’ai trouvé La Fleur Divine. Ce grouped’Haïtiens se réunit tous les samedis après-midi, dans la paroisse Saint Charles du XXème arrondissement. C’est encore Paris, mais c’est le XXème : immigrants, monoblocs, boucheries halal, cafés marocains, plats chinois à emporter.
L’église où le groupe se réunit est une masse sombre surmontée de deux tours grises qui se détachent contre le ciel. Dans le crépuscule froid, une clarté jaune faible et chaude filtrait par la porte entrouverte, en haut de l’escalier de pierre. Les chuchotements d’une litanie en descendaient. J’aurais dû arriver avant que la Fleur Divine ne commence ses trois heures de prière charismatique, mais j’étais une fois encore en retard et je ne pouvais cesser de me le reprocher.
-Si j’arrive quand ils ont déjà entamé la prière, il sera plus difficile de trouver une bonne place pour passer inaperçue, la place d’où regarder sans trop me faire remarquer.
La lumière chaude des bougies tapissaitles murs intérieurs de l’église. Le bâtiment a été construit en 1914, mais l’intérieur correspond à tous les clichés des cryptes romanes médiévales. Des arcs bas, lourds, délimitaient les nefs, des statues de saints et de vierges souffraient dans les chapelles latérales, la lumière scintillante des cierges fabriquait des ombres longues et dansantes.
Quand je suis rentrée, l’église était à demi vide, les personnes s’étaient regroupées dans une des nefs et n’étaient pas plus de vingt-quatre. Leur chant m’a fait comprendre qu’elles récitaient le chapelet, mais je n’arrivais pas à en distinguer les paroles. C’était des sons collés, superposés, indéchiffrables. Je me suis assise sur un banc en bois, seule,le dernier de ceux qui étaient occupés.
C’est vrai, j’étais arrivée en retard mais, de toute façon, le plan de passer inaperçue était pour le moins ingénu : j’étais la seule blanche. Tous, toutes étaient noirs, avaient des belles chevelures crépues, des peaux brillantes sous la lueur faible des cierges, des voix profondes et musicales. Et moi je ne savais même pas le Notre Père en français pour sentir un peu moins que je faisais tapisserie.
On a prié le chapelet durant une demi heure. Rythmique et monotone, le ton montait, il devenait plus fort, plus envoûtant. Un Haïtien d’environ 35 ans, au blouson Adidas bleu avec trois rayures blanches, en jean et avec une grande croix rouge métallique aux bords dorés à la main a commencé à prêcher. Le prédicateur marchait dans le couloir entre les bancs, élevant la croix rouge : Merci, Viens Jésus, merci maman Marie.
Une femme, 50 ans, dodue, pas très grande, a baissé la tête. À ce moment-là, le prédicateur, sans cesser de crier son discours enflammé, a posé la croix sur la tête de la femme, et la main sur son épaule.
-Viens, Jésus, viens. Descends, Saint-Esprit, viens.
Des personnes se sont approchées, l’une d’elles a pris les lunettes de la femme, les autres levaient leurs mains ouvertes vers elle. Elle n’a pas trop résisté, et s’est laissée aller : ceux qui étaient à côté l’ont rattrapée, au moment où son corps glissait à terre.
La voix du prédicateur dirigeait la prière sur un rythme chaque fois plus accéléré. Au sixième rang, une femme, plus jeune, dans la trentaine, a commencé à s’agiter. On écoutait ses cris sur le chœur des voix. Elle est tombée au sol, ou s’y est jetée. Elle roulait sur elle même, dans l’espace étroit entre les prie-Dieu. Elle criait, donnait des coups de pieds sur lesol en mosaïques. Ses coups de poing contre les bancs résonnaient le long des murs de pierre. Durant 10 longues minutes elle a cogné les sièges en bois. Les cris de la femme éveillaient des échos cachés.
Le prédicateur s’est rapproché : il demandait de laisser agir Jésus, invitait les présentsà prier avec lui. Dans un mouvement brusque et véloce, il s’est agenouillé près de la femme, et il a mis la croix sur sa tête.
-Délivrez-nous, Seigneur, délivrez-nous de tout mal, de tout démon. Hissez les rosaires, Satan haït les rosaires et la prière ! Je te chasse, je te chasse au nom de Jésus. Va-t’en Satan, au nom de Jésus.
Cinq minutes. Encore cinq minutes interminables, la femme par terre, le prédicateur incliné sur elle, la croix posée sur sa tête, légèrement en arrière, les yeux mi-clos. L’assemblée, en cercle, criait : -Va-t’en, Satan, et dessinait des croix invisibles dans l’air raréfié.
Ensuite la femme s’est calmée, le prédicateur s’est relevé. Il a continué à prier encore quelque temps, a demandé à ses frères de se déplacer vers le centre de l’église. Un jeune homme s’est assis à la batterie. Il marquait un rythme plus animé, plus festif. Les assistants sont passés de la prière au Gospel, un gospel joyeux au son divin. Les corps en suivaient le rythme, avec grâce. La fête avaitcommencé. Comme tous les samedis, le Diable pouvait se présenter dans la paroisse Saint Charles du XXème arrondissement. Comme chaque samedi, s’il apparaissait, on l’expulsait à force de prières. Et on n’avait même besoin d’un prêtre.
Le frère Jean et le père Florent
Je voulais élargir géographiquement mon investigation, donc j’ai continué à chercher des exorcistes et des ensorcelés dans d’autres lieux de France : j’essayais de les repérer par tous les moyens disponibles. Sur internetil y a des milliers de sites sur ce sujet, des centaines en français. J’ai appris à distinguer rapidement ceux qui sont catholiques de ceux qui ne le sont pas. L’un des sites a attiré mon attention, parce qu’il était étrange : il s’appelait Vade Retro. C’est le site de l’IAD, International Association for Delivrance,une association qui a été créée il y a quelques années pour travailler à la délivrance des esprits mauvais et la guérison intérieure. J’ai écrit à ce site, sans grand espoir : je demandais une entrevue avec le frère Jean. Celui-cim’a répondu quelques heures plus tard : son agenda était très chargé, il ne pouvait pas me recevoir avant le 29 février. J’ai insisté :
-Je suis argentine, je reste peu de temps en France, on m’a parlé de vous, il est important pour moi de vous rencontrer.
Je me suis demandé si ce discours était utile avec des prêtres surchargésde tâches diverses et variées, qui travaillent trop et dorment peu, mais il a fonctionné. Le frère Jean –appelons-le Jean, il a préféré rester anonyme-, m’a donné rendez-vous pour lundi 18 janvier à 22 heures. L’heure m’a surprise : 10 heures du soir n’est pas très courant pour un entretien professionnel de ce côté de l’Atlantique. En plus, il m’avait convoqué dans une ville de la Picardie, à 80 kilomètres de Paris : la ville se situe près d’un aéroport lowcost, mais le dernier train y part à 20 h 10, et je ne pouvais pas en revenir. J’ai fait alors des projets fous : louer une voiture et rentrer seule, dormir dansun hôtel. Mais la solitude nocturne suite à un entretien avec un exorciste ne me tentait pas: la nuit est sombre et peuplée d’horreurs que je ne voulais pas éveiller.
Heureusement, quelques jours plus tard le frère Jean m’a rappelée et a changé l’horaire de la réunion : il m’attendait à midi, le 18 janvier. J’ai respiré, soulagée.
Le frère Jean m’a reçueà l’Episcopat, une maison en pierre dans une ruelle étroite, pas très loin de la cathédrale. La ville est petite, mais connue : en plus de l’aéroport, elle possède une magnifique cathédrale gothique qui dresse ses flèches vers le ciel gris de l’hiver. Au centre-ville, les places conservent encore les décorations de Noël, des lumières de couleurs en forme de rennes, de sphères, de sapins. Le reste est la carte postale d’uneville française typique : des boulangeries, le marché, des boutiques de cadeaux-souvenirs pour touristes.
Le frère Jean a été ponctuel, j’ai attendu cinq minutes dans une petite salle, et il m’a reçue. Son bureau s’ouvre sur un cloître vert et agréable, les murs y sont rouges. C’est un lieu chaud, qui invite à la conversation. Le frère porte l’habit de son ordre, et des sandales en cuir malgré le froid de janvier. Il est ouvert et sympathique, il ressemble plus à un Italien qu’à un Français du nord.
-Je passe la plupart du mois en Italie, me dit-il, dans un sanctuaire de mon Ordre. L’évêque d’ici était intéressé par mon expérience d’exorciste. J’étais sur le point de refuser lorsque j’ai découvert qu’il y a un vol lowcostdepuis Bologne, pour 60 euros, alors j’ai accepté. C’est la providence divine !
Jean est exorciste depuis plus de17 ans. Il a exercé son ministère à Toulon, Lyon et dansle Var. Il voyage beaucoup de par le monde : il tient des conférences sur l’exorcisme et les maux modernes. Il a parcouru une bonne partie de l’Afrique, du Congo au Cameroun, de Cotonou à Abidjan, et c’est là qu’il a affiné sa théorie des portes ouvertes. Le Démon entre par les portes ouvertes : l’hypersensibilité, le poids de l’hérédité, les blessures de l’enfance sont des entrées possibles. Le frère Jean parle, sûr de lui et exhaustif. Il a étudié durant des longues années la Bible, et il a découvert, dans l’Apocalypse de Jean, la confirmation de ses soupçons sur les temps qui courent.
-Dans le livre de l’Apocalypse la bête de la terre, au service de la bête de la mer, fait des prodiges pour séduire les habitants de la terre. Elle est capable, par exemple, de guérir ou de faire des prophéties vraies. On peut penser à certaines thérapies énergétiques comme le Reiki dont la Commission Doctrinale de la Conférence Épiscopale des USA a interdit l’usage dans toutes les institutions catholiques.
Satan apparaît dans la Bible : il tente Ève sous l’aspect du serpent, Jésus et les apôtres l’expulsent des corps des Juifs en Galilée, Jean évangéliste lui attribue le chiffre 666. Mais le rencontrer dans le quartier, habillé comme un maître de yoga ou une masseuse de reiki était fort inquiétant : le mal était proche.
***
Jean-Serge m’a emmenée voir des prêtres qui faisaient des exorcismes en Normandie. Il m’a présenté le père Florent : un prêtre de Kinshasa qui habite dans un village du nord de la France depuis plusieurs années.
Il n’est pas très grand : le blanc de son clergyman brille sous un gros pull en laine marron.
Le père Florent travaillait avec une religieuse, une laïque et une psychologue. Il recevait des gens divers, originaires d’Afrique, d’Haïté, et des Français. Le père Florent sent peut être qu’il n’a pas reçu la formation exacte pour devenir exorciste : il s’est formé, me raconte-t-il, en Écoute Spirituelle. Cette formation l’a aidé à discerner ce qui est dit de ce qui se tait, à séparer les problèmes psychologiques, les maladies, de l’action des forces occultes.
-Ce sont souvent les rapports entre les personnes qui sont perturbés. C’est souvent cela qui est à l’origine des blessures des personnes. Cela crée un climat de culpabilisation personnelle… C’est un ministère un peu bizarre, qui exige une grande patience. C’est le ministère de l’écoute.
L’évêque l’a nommé pour s’occuper des ouailles d’origine africaine : il y avait des problèmes que les curés français blancs, “gaulois”, le père Florent le dit encore une fois, n’arrivaient pas à comprendre. Il a assumé cette tâche, même s’il ne croit pas aux abîmes culturels.
-Je pense que l’humanité est la même, que les demandes sont les mêmes, c’est la formulation qui change, mais je pense que c’est la même chose. La question est de percevoir un peu les rouages, les croyances qui sont balayées ici, et qui pour l’Afrique sont importantes. Par exemple, la croyance qui concerne la sorcellerie. Les Africains y croient, et il faut en tenir compte dans l’écoute. On ne peut laisser cela de côté, car les problèmes de relation sont là, il faut toujours chercher à aller plus loin, écouter les non-dits.
Finalement, Florent nous a raconté qu’un après-midi un homme est venu le chercher: blanc, père de famille, il disait qu’il avait un problème chez lui, une présence. Florent a essayé d’en savoir un peu plus. Le père lui raconte alors : -D’abord, notre fils cadet nous a dit qu’il y avait quelqu’un dans la maison. Ensuite, notre fils ainé aussi a vu une présence. Aucun d’eux ne voulait plus rester seul. Plus tard, les parents ont commencé à sentir un air froid qui gelait le sang, des courants, peut être des chuchotements.
-Pourriez-vous bénir la maison, mon père ?
Le prêtre dit qu’on ne doit jamais refuser ce type de demandes : il est allé y célébrer le rituel. Le père Florent n’était pas sûr que la maison fût ensorcelée, mais la bénir pouvait les libérer psychologiquement. Mais il ne s’est pas arrêté là: il a continué à faire des recherches, et il a su que la maison avait été habitée par un couple qui avait jeté un bébé à la poubelle dans un moment de folie, enveloppé dans un sac plastique. Les éboueurs l’avaient retrouvé trouvé, mort, quelques jours plus tard. Le père Florent ne sait pas si le père et ses enfants connaissaient l’histoire, mais apparemment la bénédiction a marché : les personnes ne sont plus revenues.
Florent m’a montré ses libres de chevet: Discerner les stratégies diaboliques et triompher sur la sorcellerie, Un exorciste raconte, Mon expérience d’exorciste. J’ai remarqué une guide, pas très épais, avec les instructions pour commencer une prière de libération : « Débrancher le téléphone (confidentialité assurée). Sur une table : Nappe, crucifix, statuette (ou icône) de Marie, Bible, Bougie (+ un lumignon allumé par enfant mortavant d’être né). La personne doit jeûner la veille au soir, ou s’imposer une autre privation volontaire dans les jours qui précèdent ».
Jean-Serge, qui m’avait conduite dans sa voiture, a regardé l’heure et il a vu que le midi était passé. Il a invité Florent à déjeuner: chez lui il n’y avait pas grand-chose à manger. Nous sommes montés dans la voiture, et nous avons fini dans un Mc Donalds. On a commandé sur les écrans tactiles : trois hamburger avec bacon et frites. J’ai payé : c’est que je leur devais beaucoup. Durant le repas nous avons parlé des problèmes politiques de nos pays, de toutes les langues qui se parlent à Brazzaville et Kinshasa, ils ont bavardé sur les rivalités entre leurs villes. Trois étrangers causaient, échoués dans un Mc Donald anonyme de la périphérie de quelque pays du Nord. Si je devais penser une métaphore de la globalisation, je ne pourrais en imaginerde meilleure.
***
Sophie a raconté ses problèmes au prêtre de sa paroisse. Il y a d’autres patients qui y sont amenés par un proche : c’est le cas du premier exorcisme du père Georges. Un jeune homme, fils d’un général des forces armées françaises, avait des problèmes avec ses camarades. Ils l’isolaient, ils le fuyaient à cause de ses commentaires précis et méchants :
-Dis-donc, toi, dimanche après midi qu’est-ce que tu as fait avec la fille avec qui tu étais ? Pourquoi tu as volé ce pull dans le magasin ?
Sa mère, une dame catholique de la bonne société, l’a entraîné chez l’exorciste de Paris. Suite à l’entretien, ils ont décidé de pratiquer le rituel. L’exorcisme majeur, celui qui se pratique sur des personnes avec une possession prouvée, constitue pour l’église un sujet brûlant. Deux assistants, des femmes, priaient le rosaire dans la chapelle : deux prêtres ont commencé à invoquer les saints.
-Sainte Marie, Vierge des Vierges, priez pour nous.
Le garçon, que nous appellerons ici Pierre, se débattait en pleine furie: il criait, hurlait, il marchait à quatre pattes contre les murs. Les prêtres ont associé les gestes aux oraisons: le père Georges a posé son étole sacrée sur l’épaule du possédé.
-Non, pas ça, ça brûle, ça brûle !
Pierre avait l’énergie de ses 19 ans : il l’exprimait tout entière avec des cris et des contorsions. À un moment donné, il a tourné sa tête vers le père Georges et il lui a dit :
-Homme de peu de convictions !- et il a continué àhurler des sons inintelligibles avec une voix grave.
-Reconnais la puissance et la vertu de Jésus-Christ, qui t'a vaincu dans le désert, a triomphé de toi dans le jardin, sur la croix, t'a dépouillé. Retire-toi de cette créature !
Le rituel fini, Pierre, épuisé, s’est adressé au prêtre :
-Je crois qu’il vous a dit quelque chose. Mais ne l’écoutez pas, il ment tout le temps.
Ce récit m’a terrorisée. Quelqu’un s’adresse à vous comme si vous étiez transparent, et il connaît les choses que vous avez enfermé dans un tiroir au fond de votre cerveau, ou de votre cœur. Je sais où tu étais la nuit dernière. Heureusement le père Georges a interrompu ce récit : il a reçu un appel. Il est sorti de la chambre pour y répondre. Quand il est rentré à nouveau, il m’a dit qu’il avait fait bien, il s’agissait d’ un cas difficile.
Le garçon est revenu à trois reprises, tous les quinze jours : les trois fois il a été exorcisé. Quelques mois plus tard, sa mère a appelé pour dire que son fils allait très bien.
***
J’ai rencontré Anne une dernière fois au salon de l’hôtel Hilton près de Saint Lazare: elle rentrait en Normandie, et cela lui convenait de nous retrouver près de cette gare. En plus, samedi était son anniversaire, et elle voulait le fêter. Nous avons trinqué avec du blanc sec à son anniversaire et à mon travail.
-J’ai un dialogue permanent avec Dieu. Je lui parle, il me répond, le soir, le jour suivant. Je lui ai parlé de toi, il aime ton travail, il l’approuve.
J’étais contente : c’était la première fois depuis de nombreuses années qu’on ne me considérait pas comme une intruse qui dérangeait. Le large sourire d’Anne me l’a confirmé : ce que tu fais est de Dieu.
Nous nous sommes dites au revoir, chacune est repartie de son côté. Elle m’a envoyé encore trois messages sur mon portable : les deux heures et sept minutes de notre rendez-vous n’avaient été suffisantes pour elle, et elle voulait éclaircir quelques points.
Je reste songeuse : j’ai commencé ma recherche par un entretien avec un exorciste aux yeux clairs, j’ai continué par la prière du Notre Père dans une église d’Haïtiens, et je finis en parlant de sorcellerie dans le bar du Hilton avec une Française blanche comme le lait de Normandie. Au final, c’est assez clair pour moi, chaque société affronte ses fantômes etses démons. Et le démon semble être partout : aux marges de la folie, dans la solitude, dans l’impossibilité de communiquer entre nous, chez les autres. Surtout chez les autres.